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DANS LES MUSÉES

Lustre en argent (Allemagne, 1735-1736) – Époque Louis XV

Extraordinaire lustre en argent à 8 bras de lumière
orné de feuilles d’acanthes, pattes de lions, masques, chevaux de la Maison de Hanovre et putti supportant la couronne royale.

Marques de Balthasar Friedrich BEHRENS d’après un dessin de William KENT.
Deux lustres identiques figurent dans les collections royales britanniques.

Provenance : Galerie Kraemer
Museum of Fine Arts, Boston.

En savoir plus : Le travail de l’argent en Allemagne à l’époque de Louis XV.

Lustre en argent (Allemagne, 1735-1736) - Louis XV

Le travail de l’argent en Allemagne à l’époque de Louis XV.

Alors qu’en France règne Louis XV et la rocaille, l’Allemagne confectionne de rares objets en argent, comme ce lustre en argent à huit bras de lumière.  Faisant partie d’un ensemble de cinq autres lustres, cette œuvre a été commandée par George II (1680-1760) pour le « Rittersaal », une grande pièce dans le château de LeineSchloss à Hanovre, situé en Allemagne.

Une collaboration rare entre un artisan anglais et allemand.

Bien que caractéristique de la production allemande, le dessin du lustre a été réalisé par l’Anglais William Kent, entre 1736 et 1737. Sa conception a ensuite été confiée à l’Allemand Balthasar Friedrich Behrens dont la marque est visible sur la colonne.

William Kent est un menuisier du Yorkshire qui commence comme apprenti chez un peintre de carrosse. Il part ensuite en Italie où il étudie la peinture aux côtés de Giuseppe Chiari, puis rencontre Richard Boyle qui l’établit à la cour d’Angleterre. Il reçoit alors de nombreuses commandes, tant comme architecte que comme designer. Nombre de ses créations ont été réalisées en argent. Les lustres commandés par George II en font partie. Pour ces derniers, il puise son inspiration dans les formes classiques et dans ses travaux antérieurs, tels qu’un projet de décoration réalisé à Kensington Palace en 1720. Il utilise à nouveau les sphinges naissant de feuilles d’acanthe et les putti se retenant à la couronne.

A la réception des modèles, Behrens ressent le besoin de réaliser quelques modifications afin de proportionner les charges. Il inverse notamment la position du cheval, alors représenté à l’envers et fait surmonter l’écu d’un bonnet électoral au lieu d’une couronne.

D’après les sources des archives de l’État d’Hanovre, Behrens a été chargé dans un premier temps de réaliser deux lustres d’après un modèle en bois, puis signa un contrat lui en commandant trois autres pour 364 livres d’argent.

Les lustres sont livrés les 6, 16 et 27 novembre 1737. La collaboration entre un artisan anglais et allemand est un rare témoignage des échanges entre les deux territoires Hanovriens, que sont Hanovre et la Grande-Bretagne. Jusque-là, George II prenait le soin de différencier les artisans travaillant pour les palais de ces deux pays.

Une oeuvre traditionnelle à l’inspiration européenne

Les huit bras de lumière sont ornés de feuilles d’acanthe et soutiennent des bobèches godronnées. Par paire, ils encadrent des sphinges sur le dos desquelles naissent des flambeaux. De forme balustre, le fût est richement ouvragé de fleurs et feuilles de roseaux qui entourent un globe sur lequel sont figurés des chevaux de Hanovre en relief. Le globe soutient une couronne de souverain sur laquelle s’accrochent des putti. C’est un véritable tour de force décoratif que nous offrent ici les artisans. Le lustre ne représente pas moins de 58kg. Défi autant technique qu’ornemental : l’argent y est coulé, repoussé puis ciselé.

Avant de retrouver leur palais d’origine lorsque prit fin l’union entre la Grande-Bretagne et Hanovre en 1837. Le mobilier en argent a été pendant longtemps très apprécié par les monarques européens afin d’asseoir leur statut, à l’image de Louis XIV et de la reine Christine de Suède. A cette même époque en France, la mode est à la rocaille, l’équivalent du rococo en Allemand et en Bohème.

Une série de lustres aux propriétaires prestigieux

D’après un récit publié dans EF von Malortie en 1860, “ La Rittersaal était aménagée en salle de banquet, avec une estrade devant la cheminée flanquée de guéridons d’argent portant des girandoles d’argent. Au-dessus, les cinq lustres en argent étaient allumés”. Ce château a cependant été détruit pendant la Seconde Guerre mondiale.

Les lustres ainsi que d’autres pièces de mobilier ont été transférés au château de Windsor après l’incursion de Napoléon à Hanovre en 1803. Ils y ont été restaurés puis exposés dans la salle de bal de la Reine où ils ont été peints in situ par C. Wild puis publié par William Henry Pyne dans ses trois volumes de L’histoire des résidences royales.

Le lustre a ensuite été transmis en héritage aux descendants de George II jusqu’en 1924 où il a été vendu à des collectionneurs privés américains. C’est ensuite en 1985 que la Galerie Kraemer verra le lustre passer entre ses mains avant de le vendre au Museum of Fine Arts de Boston.

L’ensemble de lustres dont fait partie celui que nous présentons est la réalisation la plus renommée du Balthasar Friedrich Behrens. L’un d’entre eux a figuré dans la collection de M. Hubert de Givenchy (provenant également de la Galerie Kraemer) et deux se trouvent à l’abbaye d’Anglesey, Cambridge, Royaume-Uni, au sein des collections du Roi d’Angleterre, propriété du National Trust.

Lustre en argent (Allemagne, 1735-1736) - Louis XV
Lustre en argent (Allemagne, 1735-1736) - Louis XV
Lustre en argent (Allemagne, 1735-1736) - Louis XV